Il m’empêche de prier

Matthieu 6:6 : « Mais quand tu pries, entre dans ta chambre, ferme ta porte, et prie ton Père qui est là dans le lieu secret ; »

Au début de ma vie chrétienne, mon mari ne respectait pas mes moments de prière. Dès qu’il m’entendait prier, il faisait irruption dans la chambre : « Qu’est-ce que tu fais ? Tu parles toute seule ? »

Ça a duré des années. J’avais beau lui dire que je priais, il recommençait. J’essayais de refouler ma colère pour rester cohérente. Mais continuer à prier dans ces conditions était alors impossible. J’y mettais un terme instantanément. J’ai cherché à m’isoler ailleurs que dans notre chambre mais il n’y avait aucune autre pièce décente de notre logement où je pouvais prétendre à l’intimité nécessaire.

Ayant remarqué que mon mari n’interrompait pas mes conversations quand je téléphonais, j’ai eu un jour l’idée de prendre mon téléphone pour prier. Le résultat a été immédiat. Quand mon mari entrait vivement dans notre chambre quand il m’entendait parler, me voyant au téléphone, il reculait en s’excusant et refermait délicatement la porte.

Evidemment, la fois où le téléphone a sonné alors que je faisais semblant de l’utiliser, j’ai bien cru que mon stratagème allait être dévoilé ! Quand plus tard j’ai eu un téléphone cellulaire, pas de risque : je le gardais éteint contre mon oreille.

Grâce à cette avancée, j’ai réalisé que je pouvais multiplier le nombre d’endroits où prier en utilisant mon téléphone portable. Par exemple, quand j’arrivais trop tôt vers l’école pour récupérer mes enfants, je pouvais rester dans ma voiture pour prier.

Aujourd’hui, c’est encore plus simple. La téléphonie mobile a tellement évolué que plus personne ne prend pour un fou celui qui parle tout seul en marchant dans la rue. Alors j’en profite pour prier en me promenant, pour prier en tout lieu.

De ce cheminement anecdotique, je retiens aujourd’hui deux choses.

Il y a au moins deux voies possibles pour limiter les conflits : négocier ou contourner la difficulté. Autant j’ai compris la nécessité d’être en plein accord avec mon mari concernant mes dons à l’église, autant j’ai renoncé très tôt à lui faire comprendre le sens de la prière. Parler à un dieu dont il ne reconnaissait pas même l’existence me faisait passer à ses yeux pour une désaxée. J’ai donc décidé, au bout de plusieurs années de souffrances inutiles, de contourner la difficulté en « trichant ».

Pourquoi inutiles ? Parce que Dieu a prévu d’autres moyens pour qu’on lui parle, que de s’enfermer dans sa chambre et de prier à haute voix. A 32 ans, j’ai découvert que je pouvais parler à ce Dieu dont je venais de découvrir l’amour qu’il me portait, et je ne savais pas comment m’y prendre. Celles qui ont vu prier leurs parents ou qui priaient avant d’être mariées auront trouvé des façons plus subtiles de continuer à le faire en présence d’un mari hostile. Moi je me suis cantonnée à celle qui exaspérait le plus mon mari. Mais Dieu n’a pas besoin de décibels. Contrairement à ses créatures, il entend nos pensées. Apocalypse 2:23 : « je suis celui qui sonde les reins et les cœurs ». Je sais aujourd’hui que l’on peut prier secrètement dans les files d’attente, rendre grâce silencieusement avant les repas partagés avec les incroyants, prier discrètement en faisant la vaisselle.

Il me semble aussi que lorsque le Seigneur Jésus (en Luc 21:36) nous commande de prier en tout temps, cela ne signifie pas qu’il faille parler sans arrêt, occuper en permanence son esprit à construire des prières. Les mots religion et relier ont la même origine. Prier en tout temps signifie être relié, connecté à Dieu en permanence, accepter son regard, lui tenir la main, lui parler à l’occasion, l’écouter.

Si je ne prie pas, est-ce vraiment la faute de mon mari ? S’il ne peut se retenir d’interrompre mes prières, n’ai-je pas à ma portée des moyens de lui éviter de se montrer si indélicat ? Comment ai-je pu penser que prier pouvait être source de douleur ? Comment ai-je pu croire que Dieu n’avait rien prévu d’autre que la tricherie pour que je puisse lui parler ?

Savourons à sa juste valeur le bonheur de pouvoir prier en tout temps.

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2 commentaires

  • Bonjour!
    Je ne suis pas allée jusqu’à mentir pour prier mais cette situation me rappelle tellement la mienne. Que de frustrations!
    Je me souviens de ces temps de souffrance effectivement où j’allais prier dans les toilettes tant de la maison que du boulot et que c’était toujours à ce moment qu’il voulait y aller ou bien il me retenait fermement dans le lit ou venait m’interrompre en claquant la porte et en pestant.
    Aujourd’hui j’ai redécouvert la marche entre midi et deux dès le printemps et parfois en hivers pour prier à mon heure de pause. Je me surprends à parler à Ma raison d’être à tous les moments de la journée. Dieu m’a aussi fait grâce car j’ai appris à rester au lit le weekend. Je ne me lève qu’en semaine et ce n’est plus systématique. Parfois je le sens toujours irrité mais bon c’est de loin beaucoup moins tendu qu’avant. Je reconnais en effet que j’ai aussi appris à prier quoi que je fasse et je suis bien consciente de la présence de Dieu à mes côtés et au quotidien malgré tout.