Il m’empêche de rester aux repas d’église
Comme beaucoup d’églises le font, la mienne fait suivre une fois par mois le culte du dimanche matin d’un repas en commun. Chacun ramène de quoi manger. C’est un moment de grande convivialité qui peut se prolonger tard dans l’après-midi.
Je n’y reste pas.
De nos jours, l’importance que l’on accorde aux repas n’est pas la même chez tout le monde. Les schémas familiaux sont variés. Dans certains foyers, chacun se sert dans le frigo quand il a faim. Dans d’autres, les activités des uns et des autres annihilent toute opportunité de se réunir à table. Pour notre part, nous avons résisté longtemps pour préserver les repas en famille. Les enfants grandissant, je constate que le seul repas que nous avons encore l’occasion de prendre régulièrement ensemble est celui du dimanche midi. La tradition du repas dominical a toujours sa place dans notre famille.
Et cela se comprend.
Manger ensemble répond au moins à deux besoins fondamentaux : se nourrir et être avec.
Le dimanche, encore beaucoup de magasins et de lieux d’activités sont fermés. On dispose donc souvent de temps pour prolonger le moment ensemble. Les conversations sont généralement plus éclairées que celles qui suivent un dîner.
Se poser une fois par semaine est un besoin inscrit dans l’être humain, chrétien ou pas. Genèse 2:2 : « Le septième jour, Dieu mit un terme à son travail de création. Il se reposa de toute son activité le septième jour.» On raconte l’histoire de cette caravane partie en exode pour un périple de plusieurs semaines. Au bout de la première, une famille décida de s’arrêter pour se reposer et honorer Dieu. La caravane continua sans eux. La famille se remit en route le lundi et rejoignit la caravane le vendredi. La famille s’arrêta à nouveau le dimanche, laissant partir la caravane. Après son repos, elle se remit en route et rattrapa la caravane le jeudi. Au bout de plusieurs semaines, on déplorait des blessés parmi ceux de la caravane. La fatigue était telle que le groupe tout entier avançait au ralenti.
Nous avons tous besoin de nous restaurer une fois par semaine, physiquement, socialement et spirituellement. Le repas dominical et ses prolongations nous en fournissent l’occasion.
C’est pourquoi j’estime légitime l’attente de mon mari que nous mangions ensemble le dimanche à midi, plus encore que son désir que je reste à la maison le matin. En effet, vis-à-vis du culte, il n’a pas d’équivalent à me proposer. En revanche, même si c’est toujours moi qui cuisine (ce qui exige un peu d’organisation la veille), il aurait bien du mal à comprendre que je me soustraie, pour aller manger avec d’autres, au repas qu’il est désireux de partager avec moi. Il sait bien aussi que les repas d’église se prolongent. Je le laisserais seul presque toute la journée. Alors il se lancerait dans des activités fatigantes, peut-être même en négligeant de manger…
Se nourrir, être ensemble, échanger, se reposer, comment préserver cela pour mon mari si je mange à l’église ?
1 Tim 5:8 : « Si quelqu’un n’a pas soin des siens, et principalement de ceux de sa famille, il a renié la foi, et il est pire qu’un infidèle.»
Soit ! Je ne reste pas aux repas d’église… mais convenons que c’est douloureux.
Ne pas être avec les frères et sœurs dans ces moments-là, c’est passer à côté d’une opportunité de les connaître, de me rapprocher d’eux, de goûter leur cuisine !
Certains peuvent me juger à cause de cette absence systématique. Quand j’en explique les raisons, je suis généralement approuvée mais tout le monde ne cherche pas à comprendre. Plusieurs restent avec leur tristesse de ne pas m’avoir avec eux et leur déception.
Il arrive que la Cène ne soit pas partagée pendant le culte du matin mais, comme le Seigneur Jésus l’a instauré, au cours du repas pris en commun. Ces jours-là, je ressens plus fortement le manque de communion fraternelle et il m’est plus difficile de rentrer chez moi à la fin du culte.
Faire la volonté de Dieu, c’est privilégier ses proches. Je dois veiller à ne pas déposséder mon foyer de l’amour que je lui dois, au profit de mon assemblée. Marc 7:11-13 : « Mais vous, vous dites : Si un homme dit à son père ou à sa mère : Ce dont j’aurais pu t’assister est corban, c’est-à-dire, une offrande à Dieu, vous ne le laissez plus rien faire pour son père ou pour sa mère, annulant ainsi la parole de Dieu par votre tradition, que vous avez établie.»
Face au risque d’amertume devant cette difficulté récurrente, il faut lutter activement. Hébreux 12:15 : « Veillez à ce que nul ne se prive de la grâce de Dieu ; à ce qu’aucune racine d’amertume, poussant des rejetons, ne produise du trouble, et que plusieurs n’en soient infectés ;»
Il est possible de trouver d’autres occasions de manger avec des frères et sœurs, en semaine par exemple, ou en les invitant chez soi si le mari le permet. On peut négocier une absence exceptionnelle en préparant soigneusement des contreparties pour éviter la contrariété du mari. On peut lui faire réaliser quel plaisir l’on peut retirer d’un repas partagé en église, en faisant en sorte qu’il consente à y venir une fois (et se préparer à accepter qu’il reste sur ses positions).
Mais ces compensations ne constituent que des palliatifs : elles n’enlèvent pas la frustration de devoir quitter l’église avant le repas en commun. La vraie solution pour couper toute racine d’amertume est plutôt de faire du repas du dimanche midi partagé avec son mari une véritable fête.
A chaque repas d’église, je me rappelle cette anecdote rapportée par Alejandra, mon amie argentine:
«Un nouveau pasteur faisait connaissance avec une sœur pendant les préparatifs d’un repas en commun. Elle lui dit rapidement que son mari n’était pas chrétien.
– Mais alors, que fais-tu ici ? Retourne donc manger avec ton mari. Et mets-lui la nappe !»
Mon mari me prive du plaisir de manger à l’église ? « Bénissez ceux qui vous persécutent, bénissez et ne maudissez pas.» (Romains 12:14) Bénir mon mari, c’est revenir souriante du culte le dimanche matin, c’est me réjouir de manger avec lui, c’est lui mettre une belle nappe.
C’est une attitude qui peut s’étendre à bien des domaines. Et cela rend heureux celui qui reçoit, tout comme celle qui donne.
Je découvre votre blog par ce post, tellement vrai: merci.
Je crois que moi aussi j’ai les mêmes problèmes. Mon mari ne veut pas que je reste à l’église le dimanche de 10h à 12h pour ne pas rater le repas de famille de 12 alors je vais à 7h et je reviens à 9h.
Je suis heureuse que Dieu ait pourvu à une solution pour vous, avec ce culte tôt le matin. En fait, je crois que Dieu prévoit toujours une solution, un aménagement, afin que nous puissions faire ce qu’il nous demande. A nous de saisir ce qui nous est proposé. Cela nous parait parfois contraignant, mais tout ce qui a de la valeur coûte.